Pourquoi avons-nous peur ?

Pourquoi avons-nous peur? Est-ce quelque chose d'inné ou d'acquis? Voici une analyse de cette réaction émotionnelle et des causes possibles.
Pourquoi avons-nous peur ?
Laura Ruiz Mitjana

Rédigé et vérifié par la psicóloga Laura Ruiz Mitjana.

Dernière mise à jour : 23 avril, 2023

Pourquoi avons-nous peur ? Est-ce normal? Quand cela devient-il pathologique ? Quand on parle de peur, on se réfère à une émotion universelle qui permet de survivre. A travers elle on se protège de ce qui peut nous causer du tort, même si cela est parfois paralysant.

Certaines peurs sont innées et instinctives et d’autres sont apprises, comme nous le verrons tout au long de l’article. On en trouve aussi des évolutives, qui sont une composante du développement normal (surtout pendant l’enfance). Ces dernières sont transitoires et n’interfèrent pas avec le fonctionnement quotidien.

Dans cet article, nous essaierons de faire la lumière sur la question de savoir pourquoi les gens ressentent de la peur, dans quelle mesure la génétique joue un rôle ici et quelle fonction elle a dans la vie. Enfin, nous différencierons également ce sentiment de la phobie.

“D’abord, vous apprenez à avoir peur, puis cette information est stockée dans le cerveau.”

-José Antonio Portellano-

Pourquoi avons-nous peur ?

La réalité est que nous sommes programmés pour ressentir la peur. Comme chez d’autres espèces, l’ADN contient les données d’une réaction de peur face à des prédateurs potentiels et à de multiples stimuli.

Vous pouvez avoir peur de tout, bien qu’il existe des peurs plus présentes et évolutives que d’autres. Il s’agit de peurs liées au danger. Par exemple, les serpents, le feu, les hauteurs, les requins. On pense qu’elles ont un sens évolutif (adaptatif), car elles ont permis à nos ancêtres de survivre.

Selon José Antonio Portellano Pérez, psychologue clinicien et professeur à l’Université Complutense de Madrid, il y aurait deux types de peurs différentes : endogènes (congénitales), non apprises, qui sont déjà programmées dans nos gènes, et les peurs acquises.

Concernant les premières, elles sont moins fréquentes que les savants et incluent la peur des phénomènes naturels comme les orages ou la peur de la mort.

“La peur de la mort est la plus ancienne peur congénitale qui existe dans l’espèce humaine.”

-José Antonio Portellano Pérez-

Objectif de ce sentiment: la survie

Peur de parler en public.

A la question de savoir pourquoi on a peur, on trouve parmi ses premières explications le désir de survie de l’être humain. Cela a à voir avec les peurs évolutives discutées.

Par rapport à cela, une équipe de chercheurs de l’Université de Columbia à New York a étudié quelles étaient les phobies les plus courantes qui existaient, à savoir la phobie des araignées et des serpents. Parmi leurs conclusions, ils ont trouvé ce qui suit : la peur des araignées (arachnophobie) est née il y a des centaines de milliers d’années, au début de l’évolution humaine en Afrique, un endroit où les araignées constituaient un danger imminent.

La même étude révèle un autre fait intéressant : la peur était si grande à ces premiers stades de l’évolution humaine qu’elle s’est enregistrée dans l’ADN. Donc, d’une certaine manière, il y a des peurs qui sont génétiques.

“Tout au long de l’histoire des primates, les serpents ont été parmi leurs prédateurs les plus meurtriers. Ce qui signifie que la tendance humaine à les craindre pourrait être héritée de nos ancêtres.”

– Nathan H. Lens –

Différences entre peur et phobie

Pourquoi avons-nous peur ? Est-ce la même chose d’avoir peur que d’éprouver une phobie ? Non, ce sont deux concepts différents. Si ce sentiment est, dans une certaine mesure, quelque chose de normal, le fait de souffrir d’une phobie implique un concept psychopathologique. Quelles sont donc les différences?

Les peurs sont des réponses caractérisées par une sensation désagréable devant un stimulus, causée par la perception d’un danger, réel ou supposé, présent, futur ou même passé. D’autre part, une phobie est la présence d’une peur intense d’un stimulus spécifique qui n’a pas lieu d’être dangereux, auquel la personne répond avec des niveaux élevés d’inconfort, d’anxiété ou d’évitement de la situation.

Autrement dit, la peur n’est pas pathologique car elle n’interfère pas dans la vie de l’individu ni ne provoque de détérioration ou d’inconfort intense, contrairement à la phobie. Ainsi, alors que la peur aurait un sens évolutif de survie, la phobie n’en aurait pas.

Pourquoi la phobie est-elle pathologique ?

Contrairement à ce qui se passe avec la peur, les caractéristiques suivantes se rejoignent dans une phobie :

  • La réaction est hors de proportion avec le danger de la situation. Dans la peur, la réaction est généralement ajustée au danger du stimulus.
  • Elle est irrationnelle, résistante aux explications et au raisonnement. La peur peut être mieux gérée, même si les phobies sont difficiles à contrôler.
  • Les situations redoutées sont évitées. Dans la peur aussi, quoique pour des raisons différentes.
  • Elles ne sont pas transitoires et ne disparaissent pas spontanément, comme c’est le cas des peurs.
  • Enfin, les phobies interfèrent dans la vie de la personne. Les peurs ne le font pas, ou si elles le font, ce n’est pas de manière significative.

Le pourquoi de la peur

Comme nous l’avons vu, la peur est une réaction normale de l’individu face à des situations dangereuses. S’il est vrai qu’il existe des personnes qui peuvent développer des peurs face à des stimuli qui ne sont pas dangereux (parler en public, interagir avec d’autres personnes), cela se produit chez celles qui ont plus d’appréhension.

Ainsi, les insécurités et la faible estime de soi expliqueraient aussi en partie l’apparition de certaines peurs, notamment celles dirigées contre des stimuli a priori non dangereux. Un exemple de celles-ci serait les peurs de nature sociale, qui, si elles s’intensifient, conduisent à la phobie sociale.

Peurs apprises

Vivre une expérience traumatisante augmente également la probabilité de développer ce sentiment ou une phobie. Si un chien nous mord et que nous en développons une phobie, par exemple. Les possibilités sont infinies.

Dans ces cas, on parle de peurs apprises. Selon le psychologue José Antonio Portellano, une grande majorité des peurs que nous ressentons sont conditionnées. Il y a d’abord un apprentissage pour avoir cette peur, puis l’information est stockée dans le cerveau.

A quel endroit la peur estelle apprise ou enregistrée ? Dans l’amygdale, une structure cérébrale qui constitue le centre de conditionnement, dans lequel la signification émotionnelle des signaux sensoriels est maintenue.

Peur de voler dans un avion.

Peut-on éradiquer nos peurs?

La réponse est oui. Il existe diverses raisons qui expliqueraient comment et pourquoi nous perdons certaines peurs. Les évolutives typiques de l’enfance (le noir, être seul, les inconnus) disparaissent d’elles-mêmes avec le temps. C’est-à-dire qu’elles s’estompent dans une certaine tranche d’âge.

Il existe d’autres peurs qui se perdent aussi en travaillant dessus (en thérapie, s’exposer à la situation). Enfin, à un niveau plus biologique, il existe un curieux syndrome, celui de Kluver-Bucy, qui implique une lésion des amygdales du cerveau et qui engendre une insensibilité générale aux stimuli générateurs de peur.

Nous avons tous peur

“Ce n’est pas la mort qu’un homme doit craindre, mais qu’il ne commence jamais à vivre.”

-Marc Aurèle-

Il est pratiquement impossible de ne pas avoir peur. Tout le monde éprouve plus ou moins ce sentiment et selon les stimuli. Tout environnement socioculturel peut faciliter, à un moment donné, le sentiment de peur de certains stimuli.

Avoir peur n’est pas pathologique, mais quelque chose d’évolutif. Cela a toujours du sens, mais parfois nous devons agir pour découvrir ce qu’il essaie de nous dire.

En général, la meilleure solution pour la surmonter sera de faire face à la situation que nous essayons d’éviter. La peur doit nous servir à évoluer et à apprendre, ainsi qu’à prendre conscience de nos insécurités, à ne pas revenir en arrière ou éviter de vivre vraiment.



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